Ma vie petite
Je me souviens encore du jour de ma première rentrée des classes.
J’avais hâte de me retrouver à l’école. J’allais pouvoir me faire de nouveaux amis, et présenter mes nouveaux amis à mes amis actuels.
Ma maman m’avait acheté un sac à dos trois jours avant, avec un petit mouton adorable brodé dessus.
Je l’avais montré à tous mes amis qui étaient déjà jaloux parce qu’eux n’en avait pas d’aussi beaux.
Mon premier jour en classe était comme je me l’imaginais. A un détail près. Les amis que je m’étais déjà fait avant l’école ne s’entendaient pas avec les nouveaux amis que je m’étais fait en à peine un jour d’école. Ils ne voulaient même pas se parler sur des prétextes insensés.
A peine rentrer chez moi le soir même, que je m’enfermais dans ma chambre.
Me premiers amis voulaient me garder pour eux seuls, sous prétexte que les autres amis que je m’étais fait allaient me faire du mal et me rendre triste, alors que eux ne le ferraient jamais.
Ils étaient égoïstes.
Moi, dans ma tête vielle de trois malheureuses années, je ne réalisais pas encore tout ce que cela signifiait.
Petit à petit au fil, des jours, j’ai fini par écouter mes premiers amis.
Car tous le gens de ma classe se moquaient de moi pour diverses raisons.
Le pire étant le surnom qu’ils m’avaient donné : la fille bizarre.
Pour eux je parlais souvent toute seule, et c’était trop étrange pour eux. Juste pour ça, j’étais catalogué avec ce surnom blessant et narquois que je me suis coltinée toute ma primaire. Rien de très inhabituel de la part d’enfants qui sont, nous le savons si cruel, mais pour la petite fille fragile que j’étais, c’était comme un cauchemar vivant.
C’était le début de mes ennuis. Les ennuis qui comme vous le devinez m’avais conduit dans ce fichu hôpital que je détestais tant.
Mes amis
D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu des amis.
Depuis bébé, à maintenant. Je suis peut être enfermé dans une fausse prison, mais ils étaient toujours là pour moi. Ils m’aideront toujours, me pousserons toujours à être la plus juste avec moi-même, et surtout me soutiendront toujours.
Lorsque le drame est arrivé, ils ont été la pour moi, mais contrairement à d’habitude ils n’ont pas réussit à me réconforter. Même pas à faire arrêter la marre de larme qui se formait sur mon corps.
Souvent quand je pense à eux, ou que je parle d’eux, je dis que je les ai eus dans une pochette surprise.
Et c’est presque vrai. Ce n’est jamais moi qui aborde les gens qui vont devenir mes amis, c’est toujours eux qui viennent vers moi. Et ils sont tous différents. Autant physiquement que mentalement. Ils sont jeunes, adultes, vieux, rieur, tristes, colériques, farceurs, enjoués, dépités….
L’une de mes plus vielle amies, que j’ai depuis ma petite enfance s’appelle Lila. C’est une gothique. Le rouge à lèvre noir, les boots compensés, le grand manteau en cuire noir qui fait limite cape. Le bustier à moitié déchiré et raccommodé avec des chaines pour que les trois malheureux bouts de tissus tiennent ensemble, la jupe a dentelle ultracourte, les bas-résille troués. La coiffure typique, avec les cheveux noir charbon, un côté rasé l’autre qui pend négligemment, des nœuds noir parsemés sur quelques mèches.
Un maquillage (en plus de son rouge à lèvre que ne la quitte jamais) outrancier, toujours noir, comme le reste. Des pupilles presque noirs. Des bijoux et piercings qui transpercent sa peau de toute part. Sans parler des tatouages qui recouvrent sont corps. En résumé, tout un attirail bien à elle qui donne dans le dark.
Et à côté de ça, une peau aussi blanche que la craie.
Je la vois très souvent, elle vient prendre de mes nouvelles et je lui parle pendant des heures durant.
Un peu de répit
Quand j’avais quinze ans, j’ai eu un peu de répit. Ma mère m’a sortie de l’hôpital dans lequel j’étais. Enfin, la vérité serait que je me suis faite éjectée car les médecins semblaient ne plus pouvoir rien faire pour moi. Pensez bien que maman n’y a pas cru une seule seconde.
Elle avait bien essayé d’insister auprès de mon père pour qu’il me reprenne durant le court laps de temps où je serais relâchée dans le monde, mais il lui avait fait clairement comprendre qu’il n’était pas là juste quand elle en avait besoin et que la garde des enfants, était uniquement réservée à elle et non à lui, comme elle le lui avait si bien fait comprendre au tribunal lors de leur divorce. ‘‘Mon mari n’est pas capable d’élever des enfants même pour dix minutes si je reprends tes paroles’’ lui avais-t-il rétorqué en dernière phrase pour lui clouer le bec.
Je suis donc restée à la maison avec elle et mon frère le temps que je réintègre une autre institution.
Je n’avais bien entendu pas le droit de lui parler, ma mère ayant tellement peur que je lui insuffle mes idées malsaines dans la tête. Le séjour que ma mère voulait me faire faire chez mon père était bien évidement pour cela, je ne devais pas pervertir son petit enfant chéri tellement pur. Mon père n’ayant pas d’enfant dans sa maison, ça aurai été pour elle, une bonne raison de m’y envoyer ; en plus du fait qu’elle n’aurait pas eu à s’occuper de moi.
A la maison je fus donc cloîtrée dans ma chambre sans avoir le doit d’en sortir. Comme si j’avais été atteinte d’une maladie contagieuse.
Si vous vous demandez quelle genre de mère traiterai sa fille de cette manière, ne chercher pas loin, puisque je vous répondrais ‘‘la mienne’’.
Les seuls moments où je pouvais les voir, c’était lors des repas.
En revanche si j’ouvrais la bouche, j’avais le droit à un regard noir de la part de maman qui surveillait attentivement tous mes propos. C’était la première fois que je sortais de ma prison depuis 3ans sans un réintégrer une autre dans la foulée, et je me retrouvais dans une autre prison ou je n’avais, en plus même pas le droit d’émettre un son.
Si je proposais de faire la vaisselle, elle me disait de retourner dans ma chambre pour me reposer car j’en avais besoin. Si je proposais de faire à manger elle me disait que ce n’était pas la peine, elle s’en s’occupait déjà ou allait s’y mettre ‘‘vas dans ta chambre tu t’y sentiras mieux’’ ajoutait-elle à la suite. Si je proposais de faire un peu de ménage, elle me disait que la maison était bien assez propre comme ça et que si je voulais vraiment faire du ménage je n’avais qu’à en faire un peu dans ma chambre. Si je proposais de regarder un film après le dîner, assis tous les trois en famille sur le canapé, elle me disait que la télé ne fonctionnais plus, et que de toute façon, il était l’heure d’aller dormir. Bref, tout était prétexte à ce que je me rende dans ma chambre et à ce que j’y reste surtout.
Je me retrouvais donc dans ma chambre, à ne rien pouvoir y faire. Ma mère l’avait presque aseptisé tant tout était carré, vide, et propre.
Pas de livre, pas d’ordinateur, pas de télé, juste un lit, une armoire des vêtements. J’avais tout de même le droit à un crayon et à une feuille ou un cahier. Mais uniquement si je le demandais, comme si je trouvais encore au service psychiatrie.
Etre ici ou là-bas ne me changeait en fait pas vraiement.
Je passais donc mes journées à dormir, et mes nuits à regarder le ciel par ma fenêtre.
Mon seul plaisir était là. Assise sur ma fenêtre, un trou d’au moins 6mètre en dessous de moi. Les étoiles et le vent qui s’engouffrait par brises tièdes m’entourant de son doux murmure, pour seule compagnie.
Ma mère habitait à la campagne. A environ une quarantaine de minute d’une grande ville.
Un village de pas plus de deux cent habitants. Un village paumé. Un village mort.
Et moi, toute les nuit je regardais ce village mort, je le détaillais, je l’épiais, je le surveillais…
Je me sentais peut être emprisonnée comme je l’avais été ces dernières années, mais au moins, lorsque je regardais par ma fenêtre, je ne voyais pas du grillage et une cour vide, je voyais le monde, le vrai. Avec la vapeur qui s’échappait de l’asphalte fumant se refroidissant lorsque la nuit tombait, la forêt se réveillant aux bourrasques de vents nocturnes, les branches s’agitant comme si les arbres étaient vivant, les animaux qui passaient ci et là en espérant ne pas se faire voir…
Il était là mon répit, dans se monde que je redécouvrais, se monde qui était réel et non pas artificiel comme celui que je côtoyais depuis des années.
Elle et lui
Lorsqu’il m’adressa la parole pour la première fois, je ne lui répondis pas.
J’avais la fâcheuse tendance à ignorer les gens et à rester dans mon coin.
Sans doute avais-je vu trop d’horreur et préférais-je rester seule.
D’autant plus que j’avais déjà une foule d’amis dont certain ici avec moi dans l’hôpital ; tous là pour moi, pourquoi en aurais-je voulu un autre ?
La deuxième fois qu’il m’adressa la parole, j’étais tellement dans mon monde, que je ne me rendis même pas compte qu’il me parlait. Jusqu’à ce qu’il me tapote légèremewnt l’épaule.
Ayant l’habitude de ce genre de comportement de la par des gens qui m’entour, je n’y prêtais pas attention, pensant que c’était une des mes hallucinations qui voulaient attirer mon attention.
Alors que lui réitérait son geste, je chuchotais en levant les yeux :
-Vous pouvez pas me laisser tranquille deux secondes ? J’en ai marre de…
Mais je ne fini pas ma phrase me rendant compte que ce n’était pas l’un de mes ‘‘ami’’, mais ce mec qui avais déjà essayé de me parler, et qui était lui réel.
-Tu ne m’a pas écouté me dit-il.
Bien sur que non que je ne l’avais pas écouté, si j’écoutais tout ce qui se passait autour de moi, on serait encore la à la saint glinglin !
-Non, lui répondis-je simplement en me levant et en partant, en partant loin de lui.
Je n’avais jamais eu d’ami réels, et ce n’était pas aujourd’hui que ça allait commencer.
La troisième fois qu’il m’adressa la parole, je fis comme si je ne le voyais et ne l’entendais pas, en somme comme la deuxième fois, mais cette fois-ci, je saisissais ce qu’il me disait. Mais je n’écoutais pas vraiment, essayant de m’isoler dans ma tête. Sans réel succès je dois l’avouer.
Ensuite il ne me parla plus pendant un moment. Juste deux petites semaines, qui sont ici, un moment, en vu du temps qui passait tellement lentement.
Mais même s’il ne me parlait pas, il passait son temps à être près de moi, et à me regarder. Comme si son regard pouvait me mettre à nu, et détailler mes pensées.
Mais cela ne me dérangeait pas, je n’avais que trop eu de regard insistant sur moi durant mon enfance pour que son le sien m’affecte. Et s’il l’espérait, il se mettait le doigt dans l’œil, et très profond.
Au bout de deux semaines, il vint me chuchoter à l’oreille quelques petits mots.
Que je me forçais à ne pas écouter.
Je ne voulais pas d’autre amis, je ne voulais pas rencontrer de gens, je ne voulais pas souffrir, encore.
Quelques voix autour de moi me soufflait que cette fois ci se ne serait pas pareil, car lui était différent, car lui était ici, avec moi, car lui pourraient peut être me comprendre.
Mais je les ignorais, car seuls mes vrais amis pouvaient me donner des conseils que j’écoutais ; et ces voix que j’entendais ne faisaient pas partie des mes amis.
Je l’ignorais toujours, faisant comme si je n’entendais pas ces mots, alors que je les entendais, et que parfois même je les écoutais. Chacun d’eux était un appel qu’il me lançait. Un appel pour que je vienne à lui, un appel pour que je sois avec lui, un appel pour que sois près de lui, un appel pour que nous devenions de simples amis.
Mais pour moi, être amie n’était pas simple, et c’est ce qui me terrifiait le plus.
Plus le temps passait, plus il me mettait en colère.
En colère de le voir toujours après moi.
En colère de le voir insister.
En colère de le voir persister ; malgré mon comportement ; malgré mes regrets ; malgré tout mes défauts apparents.
Au bout d’un mois de harcèlement, je consentis à lui dire bonjours lorsqu’il me le disait lui-même. Juste pour être polie. Une seule fois par jour. Ce n’était en fait pas grand-chose, si ce n’est un simple mot qui sortait de ma bouche, lui étant destiné.
Je continuais ce jeu encore un mois de plus.
Et le fait qu’il ne change aucunement ces habitudes me surpris.
En effet il continuait, presque chaque jour, de me chuchoter des mots à l’oreille. Comme si je devais être la seule personne à les entendre.
Ces mots n’étaient pourtant que des banalités, tels que bonjour, comment vas-tu, est-ce que je peux m’assoir à côté de toi, tu veux te promener avec moi…
Seulement, je sentais qu’ils ne voulaient en réalité pas dire ce qu’ils disaient. Ils étaient plus profonds, plus forts, comme si à travers eux, il essayait de me dire quelque chose d’autre.
Ces mots allaient de pairs avec les regards qu’il ne cessait de me lancer. De longs regards appuyés et déshabilleurs. Exactement comme s’il essayait à travers ceux-ci, de me sonder, de me découvrir, de percer tous les mystères qui m’entouraient.
Curieusement ils ne me mettaient pas tant mal à l’aise que ça. Sans doute parce qu’à force d’avoir reçut le même genre de regards de la part de mon entourage, je m’y étais habitué.
Lila
Lila était toujours très proche de moi. Un peu comme ma confidente principale. Peut être parce que c’était celle qui parlait le moins dans mon petit groupe d’habitués.
Si au début elle avait pu me faire peur, maintenant ce n’est plus le cas.
Quand on remarque dans le coin de sa chambre une punk qui n’en bouge jamais, quoi de plus normal d’avoir un peu les miquettes.
Chaque jour je la vois. Et je lui confie tout. A demi mot, toutes les deux enfermée dans notre bulle.
Elle ne sait pas non plus vraiment ce qu’elle fait ici. Mais elle sait qu’elle a envie de veiller sur moi. Alors elle le fait.
Elle est assez jeune, à peine vingt-cinq ans. Elle m’a déjà expliqué qu’elle était une avant-gardiste sur son temps. Elle est l’une des premières à avoir adopté ce style punk-gothique. Avec des porte-jarretelles apparents et des vêtements déchirés, vers les années 1965. Elle n’avait pas peur des remontrances ou du regard des autres. Elle est née d’un père qu’elle ne connaissait pas, pendant la guerre. Un allemand. Sa mère était elle, française. Elle ne lui avait jamais dit si elle c’était fait violé ou pas. Quoi qu’il en soit, elle était née. Sa mère était aimante avec elle. Mais tous la montrait du doigt. Elle avait été déshonoré la mort de son mari qui était partit au front pour ne plus jamais revenir, en ayant cette battarde d’allemande. Tous la blâmaient. Ils l’avaient même tondue à la fin de la guerre lui injuriant des propos haineux allant jusqu’à lui cracher dessus. Lila était trop petite pour s’en rappeler n’ayant à cette époque que quelques années de vie, mais sa grande sœur qu’elle avait à la maison avec elle le lui avait raconté. Suite à l’histoire de sa mère, elle avait décidé de ne jamais se laisser faire et de ne jamais se laisser dicter sa vie par qui que ce soit. Elle était donc devenue une rebelle punk, se tatouant et se perçants le corps à tire-larigot. Tout était bon prétexte pour avoir un nouveau tatouage, ou un nouveau piercing. Elle portait haut et fort l’étendard des femmes dites ‘‘libres’’, et elle en était fière. Et bien entendu la suite de son histoire, la mort, lui, a été dans la continuité de sa vie qui se déroulait à mille a l’heure. Elle n’en a jamais parlé, mais je sais que ça a du être quelque chose d’horrible. Parfois, lorsqu’elle est en colère, je la vois apparaitre sous une autre forme. Plus sombre, avec un visage décharné, du sang, des morceaux de peau déchirés et des bouts d’os visibles… Le cliché du mort vivant pour en faire une description imagé. Lorsque c’est comme ça, elle part. Et je ne la revois plus pendant quelques semaines, voir un mois. Et lorsqu’elle revient, elle fait comme si elle ne se souvenait pas du moment précis où elle avait changé ou comme s’il n’était jamais arrivé.
Je lui avais déjà demandé si elle avait eu des enfants. Elle me répond souvent qu’elle aurait pu, mais qu’elle ne voulait pas faire vivre à son enfant le calvaire qu’elle, a vécut enfant. Se sachant un peu spéciale, elle savait les risque qu’encourait sa fille de se trainer une mère telle qu’elle, allant contre les règles et là ou bon lui semblait, tant que ça lui plaisait. Elle c’était donc toujours débrouillée pour ne jamais avoir de bébé, allant même jusqu’à se faire avorter. Je passerais sous silence ce passage, tant la ‘‘technique’’ employé à l’époque était terrible.
Lila était une femme qui ne se laissait jamais soumettre, avec un caractère bien trempé. Une femme forte, et sur d’elle.
Si seulement j’avais pu l’avoir en tant que personne en chair et en os à mes côtés, j’aurais pu en mettre dans les yeux, et en faire voir de toutes les couleurs à tout le monde.
Mais voilà, Lila, j’étais la seule à la voir et à l’entendre.
__________________________________________________
Voilà le second chapitre. (avec un jour de retard, j’admet, mais je vais sans doute me mettre à publier le 1er dorénavant)
Assez court je sais! Mais je suis assez surmenée en ce moment, outre le fait que j’ai repris les cours et que c’est juste deux fois plus de boulot et de temps en moins, je n’arrive plus à dormir, je suis donc dans un état de fatigué anormalement élevé, et donc, pour moi écrire relève de l’exploit, puisque ma tête ne suis plus^^
J’espère tout de même que ça vous plait, et que vous entrevoyez un peu plus le monde de ma perso principale (héhé je ne vais pas me trahir en écrivant son nom, vous croyez quoi vous!)
Sur ce, bonne soirée!